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Comment le Coachella ringardise ses confrères européens

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Le Coachella Valley Music and Arts Festival  est l’un des plus gros rendez-vous du monde de l’indie-pop. Chaque année à deux pas de Santiego et Los Angeles, ce festival propose une affiche aussi grandiose qu’inaccessible (Dr. Dre, Black Keys, Radiohead, Justice, Rihanna, etc.). Mais cette édition 2012 restera dans les mémoires comme la victoire de la sociabilité et la popularisation de nouveaux dispositifs ringardisant tout ce qui fait de ce côté de l’Atlantique.

Un cadre idyllique sous le soleil de Californie, des palmiers, des jeunes filles en bikini, des peoples incognito et surtout une pléiade de stars et jeunes groupes prometteurs se partageant les deux weekends d’avril dévolu aux concerts. Le Coachella festival fait parti de ce qui se fait de mieux en matière de festival rock. Il réunit d’ailleurs en moyenne 75.000 festivaliers par journée. Spécificité du lieu, chaque concert est doublé. Ainsi, si vous avez loupé Radiohead, le 14 avril, vous pourrez les retrouver le 21 avril.
Si la charte graphique est reconduite d’année en année, les noms qui y figurent laissent songeur, jugez plutôt :

Oui, vous avez bien lu. Les Canadiens confidentiels, mais légendaires de Gospeed You! Black Emperor y côtoient Dr. Dre & Snoop Dogg et David Guetta.

Le pari du streaming

Mais pour la deuxième année, le festival a marqué les esprits, en prolongeant son partenariat avec Google pour une diffusion en streaming sur YouTube de la plupart des concerts. Un peu plus de la moitié des spectacles étaient ainsi diffusés et rediffusés en boucle sur un site dédié à l’événement. Sur le modèle d’une télévision connectée, YouTube proposait trois chaines avec un programme détaillé et une visualisation en live du flux twitter #coachellalive. Il était ainsi possible pour l’internaute de passer trois jours enfermé chez lui à vivre le festival par procuration jours et nuits (les concerts étant rediffusés en continu), mais également de commenter les performances et la programmation proposées sur YouTube. Pour son premier weekend, le festival affiche déjà plus de  7 millions de connexions. Plus fort : les plateformes de vidéos en streaming regorgent de captations des concerts mis en ligne par des fans.

Photo sous C.C par vonlohmann

En parallèle, un site se chargeait de répertorier et cataloguer la plupart des photos prises par les festivaliers via l’application pour mobile Instagram. Il était ainsi possible de se balader autour des cinq scènes via les milliers de clichées uploadés en flux continu. L’occasion de vérifier, par exemple, la pertinence ou non de faire revenir 2Pac pour un duo virtuel avec Snoop Dogg. Si la performance a été parfaitement captée par les caméras pour YouTube et les photographes, l’internaute découvrait que pour les festivaliers, elle se résumait à un fantôme lévitant au-dessus de la scène.

Vu du Coachella façon Instagram - Photo sous C.C par soorenasalari

Bien sûr, le modèle économique du Coachella se prête particulièrement à la mise en place de ce type de système, aussi onéreux soit-il. On peut ainsi imaginer sans difficulté que pour la deuxième représentation du spectacle de Dr.Dre et Snoop Dogg, le site sera archicomplet, tant la vidéo de l’apparition de Tupac a circulé dans les médias, sur les blogs et réseaux sociaux.


Grâce aux échanges des internautes autour des diffusions en streaming et la republication pirate des vidéos par les fans, la publicité et le bruit généré autour du festival sont sans commune mesure avec une campagne publicitaire. Les théories autour de ces nouvelles formes de marketing synchronisé parlent au minimum d’une efficacité 40 % supérieure à une promotion classique. Ce modèle multiversant assure à ce festival dont le tarif des pass s’échelonne de 285 dollars à plus de 6.500 dollars, une audience assurée dont rêvent bon nombre de festivals européens, condamnés à voir leurs chiffres d’affaires fluctuer d’année en année.

Pas d’intérêt des organisateurs
Le cas de la Route du Rock est particulièrement parlant. Durant les années 2000, un faible nombre de concerts étaient rediffusés en direct sur France Inter en parallèle du festival. Historiquement, ce dernier a toujours vivoté, soi-disant victime de sa programmation audacieuse et du manque de soutien des collectivités locales. Aujourd’hui, France Inter a franchement levé le pied sur la retransmission des concerts et la structure Arte Liveweb a pris le relais en diffusant toujours aussi peu de concerts en streaming. Au lieu d’ouvrir largement ses portes aux caméras et d’investir dans une centralisation de ces retransmissions sur un site dédié, le festival a choisi de se désintéresser des équipes d’Arte LiveWeb en n’assurant pas la promotion des captations sur son site officiel (un article de temps en temps signale l’existence du dispositif) et en laissant totalement de côté le facteur social. Les discussions des festivaliers et internautes ne sont nullement valorisées, ni favorisées. Quand bien même, il se passerait quelques choses d’extraordinaire durant les concerts (une année, la chanteuse Camille s’était jetée à la mer tout habillée pendant un concert) que rien n’est vraiment organisé pour assurer la médiatisation des images des festivaliers. Le site de la Route Rock se bornant à diffuser des informations pratiques, parfois des reviews des concerts et le programme de la journée.
En France, on n’a pas de pétrole, mais on n’a pas non plus d’idées en matière de festival.

Par Brendan Troadec


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